Chambres avec vue

“Dans ces chambres d’hôtel où vit une femme à la décontraction tourmentée, on regarde la neige tomber, la ville s’évanouir, s’absenter dans la lumière blanche, avant de revenir à elle. Il y a ces contre-jours, ces embrasures parfois habitées. Il y a ces regards, et la minuscule bascule des moments. Dehors, derrière la vitre, il y a la ville et les nuages. Le programme d’une modernité presque baudelairienne. Sensibles évidemment, contemplatives, les photographies de Margaux Bonhomme portent en elles un invisible coup de canif. Et les chambres où son objectif s’arrête ne sont pas toujours claires. Elles contiennent une part d’ombre qui donne à la lumière des fenêtres ouvertes sur le monde les nuances fragiles d’un moment qui s’écoule. Et les questions soulevées par nos sentiments mêlés trouvent leur réponse. Les photographies de Margaux Bonhomme rendent immobile le plus fugace des sujets : l’instant désormais suspendu du pur présent. Comment ne pas ressentir alors cette nostalgie étrange qui nous avait saisi, puisque, comme l’avait envisagé Roland Barthes, il est ici question de mort. Entre punctum et studium, entre émotion et sujet, dans la fameuse alternative Barthesienne, les images de Margaux Bonhomme se placent d’instinct dans le premier camp, celui du détail poignant qui nous touche sans s’imposer, celui du trouble qui dépasse le protagoniste. “ (Sylvain Orhel)